Invasion en Ukraine, attention au conflict washing

Depuis le 24 février, nos yeux sont rivés sur l’Ukraine.
Absorbés et dévastés par le flot d’informations continues qui nous confronte à ce qui nous semblait, jusqu’à il y a quelques jours, impensable et irréel.

Une guerre qui, contrairement à ce qui avait été annoncé, n’est pas seulement militaire, mais cible sournoisement des civils.
Des civils, estimés à plus de 2.3 millions à ce jour, qui ont fui le pays vers la Roumanie, la Moldavie et la Pologne.

À plus de 7 000 kilomètres de la capitale de l’Ukraine, un sentiment d'impuissance nous habite.

Pour manifester leur soutien face à ce conflit et cette crise humanitaire, plusieurs marques québécoises et internationales se sont positionnées.
Soit en boycottant le marché russe.
En participant à la campagne Sauver l'Ukraine.
En faisant don de leurs profits à des organisations humanitaires.
En supportant des initiatives citoyennes, comme c’est le cas d’airbnb qui a retiré ses frais de services des 61 000 réservations faites en Ukraine.

Qu’est-ce qui fait qu’une entreprise décide de prendre position dans un tel conflit, ou pas ?

Alors que McDonald's et Coca-Cola ont décidé de quitter la Russie en soutien à l'Ukraine, malgré les millions de dollars de pertes de revenus, d’autres, comme les magasins de la famille Mulliez, les bannières Auchan, Décathlon et Leroy Merlin, y demeurent bien ouverts.

Après le greenwashing, le conflict washing ?


Certaines entreprises se sont positionnées, par exemple, en retirant le mot Poutine de leurs menus, ou encore, en changeant le nom de Vladimir pour Volodymyr.

Ces actions, sûrement candides et pleines de bonne volonté, ont obtenu un rayonnement médiatique, jusqu’au New York Times, et de l’engagement sur les réseaux sociaux.

Lorsque un geste symbolique de cette nature est posé, il convient de se demander quel est l’impact concret de ce même geste ?

Car il serait tentant d’y voir de l’opportunisme ou du washing, intentionnel ou non, lorsqu’une marque obtient une notoriété spontanée en se positionnant sur un enjeu sans avoir d’engagement concret.

D’abord utilisé pour véhiculer une image « verte » et écoresponsable, le concept de washing se caractérise par des procédés de marketing ou de relations publiques qu’utilise une organisation pour revêtir une image de responsabilité.

Avec cette crise bien particulière, sommes-nous témoin d’un nouveau type de washing, le conflict washing ?

Est-ce que la guerre, tout comme l’environnement, le féminisme, l’achat local, peut être utilisée pour redorer son image corporative ?

Nous nous sommes aussi posé la question si en publiant cette réflexion, nous étions opportunistes ? Mais, nous avons conclu que ce que nous avions tous à gagner, c'était davantage de conscientisation !

L’importance de la cohérence entre les prises de position et les actions

Cette situation nous rappelle l’importance d’être cohérent entre ses communications, ses prises de positions et ses véritables actions.
Comme l’adage le dit si bien « Les bottines doivent suivre les babines ».

Avant de crier haut et fort son soutien, les entreprises auraient avantage à prendre un pas de recul et à se poser quelques questions comme :

  • Quel est l’opinion de nos parties prenantes, dont nos employés ?

  • Souhaitent-ils participer à une initiative organisationnelle de soutien

  • Comment pouvons-nous contribuer concrètement à cette crise ?

  • Quelles organisations humanitaires, impliquées en Ukraine, pourrions-nous soutenir ?

  • Utilisons-nous des produits venant de la Russie ? Si oui, cessons-nous les achats auprès de ces fournisseurs ?

  • Avons-nous des employés, clients et fournisseurs qui sont directement touchés par la situation actuelle ? Si oui, comment puis-je les aider ?

Bref, nous comprenons le souhait des marques de se positionner et de vouloir offrir leur soutien, mais, avant de le faire, vaut mieux prendre un pas de recul et réfléchir avant d’agir afin que les bottines suivent les babines.


Anne-Marie Viens